mardi 26 juin 2018

Born on the Bayou. Prisonniers du ciel, James Lee Burke

Prisonniers du ciel / James Lee Burke

Paru en 1991, chez Rivages/Noir, Prisonniers du Ciel met en scène Dave Robicheaux, ancien alcoolique, ancien flic, hanté par les souvenirs du Viêt Nam et du Jim Beam. Pour les cinéphiles, Bertrand Tavernier avait superbement adapté pour le grand écran James Lee Burke avec Dans la brume électrique en 2009. Tommy Lee Jones y incarnait à merveille Dave Robicheaux.

On lit un James Lee Burke pour l'histoire policière, mais surtout pour l'atmosphère, l'ambiance. Quelques lignes suffisent et on est dans le Bayou, pas très loin de la Nouvelle-Orléans, dans la véranda d'une maison en bois au bord de l'eau, sirotant un Dr Pepper ou dégustant des crevettes grillées.

Prisonniers du ciel est le deuxième roman de James Lee Burke faisant intervenir Dave Robicheaux, qui mène désormais sa petite entreprise au bord du bayou, loue des bateaux, prépare des vifs pour la pêche, ouvre des bières et des sodas pour les clients. Il vit avec Annie, une fille du Kansas.

Quand un avion bimoteur vient à s'écraser dans le bayou, devant sa propriété, il se met à l'eau et y recueille une jeune fille, seule rescapé des cinq passagers. Il ignore alors qu'il vient de mettre la main dans le beau nid à emmerdes qu'est le trafic de drogue. Il recueille la jeune fille, la baptise du nom d'Alafair, et reprend son affaire, jusqu'à ce qu'il remarque une voiture rôder près de sa propriété... 

James Lee Burke parvient à camper des personnages forts, dans une langue incroyablement simple, où les bons mots ne sont jamais gratuits. C'est finalement toute une partie de l'Amérique que décrit Burke. La Louisiane, les Cajuns, les Noirs, la pègre, les Texans venus exploiter le pétrole, les maisons de style colonial, la moiteur, les nuits d'orage. 

Si vous aimez James Lee Burke, on vous conseille Tim Gautreaux et son excellent Fais-moi danser Beau Gosse, un roman sur le bayou, la fierté et la simplicité des gens qui y vivent, sur la fin d'un monde aussi. 

Pour la bande-son, on ne saurait que vous recommander Clifton Chenier. Ou encore l'album Bayou Country de Creedence Clearwater Revival.



Prisonniers du Ciel / James Lee Burke. - Rivages / Noir. 1991. Traduction de Freddy Michalski. 354 p.


jeudi 21 juin 2018

Les choses de la vie. Les hommes, Richard Morgiève

Les hommes / Richard Morgiève.

Paris, années 70. L'élection de Giscard, la fin de la DS, les gitanes au coin de la bouche. C'est ce que nous raconte, nostalgique, Richard Morgiève dans Les hommes.

Paris, années 70 donc. Mietek Breslauer vient de sortir de cabane. La routine reprend, les femmes de petite vertu qu'on entretient, les menus larcins, les tuyaux que l'on prend au troquet du coin, la piaule à Montreuil. Mietek ne sait faire que ça. Ancien alcoolique, il tourne à l'eau claire mais carbure à deux paquets de Pall Mall par jour. Il côtoie les barbouzes, les types qui ont tourné leurs vestes en 44. Mietek est jeune, dans sa voiture, il écoute Classe tous risques de José Giovanni.

Et puis le temps passe. Mietek voit la vie qui fout le camp, les proches qui partent un peu trop tôt, trop vite. Il s'imagine en père de famille, entre deux femmes son cœur balance. Les choses de la vie...



Passé relativement inaperçu lors de la Rentrée Littéraire de Septembre 2017, Les hommes est un roman hommage à ceux qui portaient feutre et pardessus. Très cinématographique, il fait songer à Gabin, Delon, Ventura. C'est un roman touchant, noir, à l'écriture ciselée proche du hard-boiled US. On lit ça et les yeux deviennent un peu humides, le cœur bat un peu plus vite. Un livre rare.

Les hommes / Richard Morgiève. - Joëlle Losfeld. 2017. 369 p.
 

Heb Frueman, les rois du hardcore meldois



Années 90 : un petit groupe underground du nom de Nirvana prend tout le monde par surprise en devenant LE groupe de rock de la décennie. Au delà du succès du trio de Seattle, c'est tout un pan des musiques alternatives qui se voit propulser sous les feux des projecteurs, du rock indé à la Pixies/Pavement/Sebadoh au folk lo-fi de Daniel Johnston sans oublier la noise (Sonic Youth, Jesus Lizard, Butthole Surfers) ou le grunge (Melvins, Mudhoney). L'un des styles à avoir profité de cette lumière est le hardcore, version US du punk rock qui, s'il existe depuis le début des 80's, s'installe durablement dans les 90's et ce, sous plusieurs aspects : dans sa forme brute avec les groupes new-yorkais qui commencent à intégrer des influences metal (Madball, Sick of It All, Biohazard), son alter ego mélodique d’influence californienne (Bad Religion, Burning Heads), ses dérives bruitistes (Portobello Bones, Condense, Unsane) ou émotionnelles (Fugazi, Vanilla)...


Pourtant, dans un petit village gaulois du nom de Meaux, un groupe pratiquait un hardcore anachronique qui se foutait complètement des années 90 pour se concentrer sur le son des pionniers des années 80. Formé en 1996, Heb Frueman (en référence au film Ferris Bueller, le fameux industriel de la saucisse de Chicago), commence à faire parler de lui en proposant un hardcore old school sec et rapide lorgnant vers les Beastie Boys (quand ces derniers faisaient du punk hardcore), les méconnus Dead Fuckin' Last ou les incontournables Minor Threat (dont ils reprenaient le Screaming at a wall), pour des morceaux fun dépassant rarement la minute. 




En 2016, le label rennais Poch Records sort en vinyle A year and a half of high altitude velocity, une anthologie de ce groupe qui a marqué les esprits de ceux qui l'ont vu à l'époque sur scène. Ce LP rassemble quasiment tous les morceaux qu’ils ont enregistrés durant leur brève existence (1996-1998), sortis à l’époque sur une démo K7 (qui sera dispatchée sur plusieurs compilations), sur un vinyl 7’’ s’arrachant à prix d’or sur Discogs et sur un split CD avec les hollandais de NRA. Si on peut regretter l’absence de leur reprise poppy du Waiting Room de Fugazi ainsi que de quelques délires hip hop foutraques présents sur le split avec NRA, cette anthologie dresse enfin un historique de l’un des meilleurs groupes punk hardcore français. Si le groupe n’existe plus depuis près de 20 ans, il faut savoir que Tit, le batteur, joue maintenant dans Blazcooky et Danforth tandis que Mehdi, le chanteur, s’apprête à sortir un disque de musique électronique sous le nom de DVNO (après avoir monté Scenario Rock en compagnie du bassiste de Heb Frueman et du grand DJ Pone de Svinkels/Birdy Nam Nam).


mercredi 20 juin 2018

Afrique adieu. Le cœur des ténèbres, Joseph Conrad


Le cœur des ténèbres / Joseph Conrad.

Ecrit par Joseph Conrad, Le cœur des ténèbres est sorti en 1899, dans son édition originale. Et c’est un court roman qui ravira les amateurs de récits d’aventure.

Alors qu’il quitte Londres à bord d’un navire sur la Tamise, Charles Marlow, qui officie dans la marine marchande britannique, relate son voyage au cœur de l’Afrique Noire aux deux marins qui l’accompagnent.
Tout en bourrant sa pipe de tabac anglais, il se remémore son embauche par une compagnie belge, le trajet sur un vapeur au fil du fleuve qui le conduira au cœur des ténèbres, à la recherche de Kurtz. Kurtz collecte et transmet l’ivoire à la compagnie. Très vite, Marlow s’aperçoit que Kurtz s’est forgé une légende. Vénéré par les indigènes, une étrange aura l’entoure. Tout au long du voyage sur le fleuve à bord du rafiot pourri, Marlow s’imagine Kurtz, jusqu’à l’affabulation.

Le cœur des ténèbres est d’une véritable force évocatrice. Le lecteur, happé, ressentira la chaleur moite, les piqures de moustiques, les odeurs de viande d’hippopotame pourrie que se partagent les indigènes sur le bateau.

Il est à souligner que Conrad dénonce l’exploitation des indigènes, Noirs, par les européens. C’est rare pour l’époque.

Francis Ford Coppola s’inspire librement de ce récit dans Apocalypse Now (1979), en transférant l’action du film durant la guerre du Viêt Nam. Par son ambiance, le film reflète l’atmosphère du roman de Conrad.



Roman de marin, quête de soi, voyage vers des terres inhospitalières, Le cœur des ténèbres est à lire si vous avez aimé les classiques du roman d’aventures : Jules Verne, Herman Melville ou encore Robert Louis Stevenson.   

Le coeur des ténèbres / Joseph Conrad. - Le Livre de Poche. Traduction de Catherine Pappo-Musard. 214 p.

dimanche 17 juin 2018

Ouais ? La playlist



Une playlist à base de Ouais ? Bah ouais !

On commence cette liste de lecture par le titre Ouais des nantais de Justin(e), certainement l'un des meilleurs groupes de punk rock francophones des années 2000/2010 qui adapte en français le Yo! de Santa Cruz, certainement l'un des meilleurs groupes de punk hardcore nantais des années 2000/2010. On poursuit avec 2 vétérans du hip hop, IV My People, collectif fondé par Kool Shen du Suprême NTM suivi des anciens rivaux marseillais du groupe IAM (avec un extrait de l'album ...IAM de 2013). Petit détour vers la Belgique avec un morceau ska assez rare du plus grand imposteur du punk, Plastic Bertrand, avant de revenir au sérieux avec Oxmo Puccino puis le mythique groupe d'Ivry, 113, qui utilise le même sample du classique electro Planet Rock d'Afrika Bambaataa, le fameux Trans-Europe Express de Kraftwerk.

On reste ensuite dans le rap avec Booba, le rappeur qui plaît aussi bien aux anciens qu'aux plus jeunes, ce qui ne doit pas être le cas d'Alain Barrière dans ce Ouais de 1969. Quelques années plus tard, en 1994, le mythique Charly Oleg, l'organiste de la non moins mythique émission télé Tournez Manège ! (et accessoirement tête de turc des Ludwig Von 88) s'associe avec le provocateur Professeur Choron, cofondateur des journaux satiriques Charlie Hebdo et Hara-Kiri dont on retrouve des couv' dans la vidéo (au passage, petit cadeau avec cette vidéo du groupe punk Garçons Bouchers dans laquelle on peut voir le Professeur Choron ainsi qu'une jeune Béatrice Dalle et le défunt Christophe Salengro avant qu'il ne devienne le président de Groland).

On termine cette playlist avec du rap autotuné, histoire d'attirer les jeunes vers la culture avec un grand Q de ce blog.